CriminalitéS et justice sociale

L’atelier « CriminalitéS et justice sociale » a été introduit autour de trois constats :

  • Des habitants se mobilisent quotidiennement, interpellent les pouvoirs publics, réclament le simple droit d’être protégés. Celles et ceux qui sont les premières victimes des formes les plus médiatisées de criminalité sont les premiers et premières à être stigmatisé·es : les habitant·es des quartiers populaires sont désigné·es responsables des crimes dont ils et elles sont victimes, c’est une double peine.
  • Les pouvoirs publics restent sourds à ces demandes légitimes. Pendant ce temps, d’autres formes de délinquances et criminalités dites « en col blanc » sont pas ou peu inquiétés. C’est une véritable forme d’inégalité sociale.
  • Les mouvements progressistes ont du mal également à répondre à cette question et à sortir du carcan sécuritaire qui nous est imposé par le débat public.

Dans le débat et à partir des témoignages de Roja, sœur du jeune Engin décédé d’une dite « balle perdue » et de Céline, mère de famille de la Busserine participant au groupe « Habitants à l’épreuve des trafics », nous avons alimenté ce constat :

  • Face à ces formes de criminalités, aucun élu, aucune institution ne réagit réellement. L’État est particulièrement absent alors qu’il s’agit de sa compétence unique
  • Les combats sont menés pour ne pas tomber dans l’oubli et conserver la mémoire des victimes
  • Les expériences associatives d’éducation populaire permettent de changer nos propres perceptions des membres des réseaux de trafic. Plutôt qu’un jugement moral, il faut comprendre comment est organisé ce système et ce qui le fait exister et perdurer
  • Sur cette question comme sur d’autres, l’expertise citoyenne est donc centrale également, notamment afin d’analyse et partager nos connaissances profanes ou savantes sur ce qui fait qu’un jeune va entrer dans une carrière délinquante : l’emprise, la consommation, l’argent, la notoriété…
  • Faire cela permet de lutter contre les représentations négatives des quartiers populaires
  • Les questions soulevées portent aussi sur l’économie de la pauvreté , difficultés d’accès des habitants des quartiers populaires au travail légal, pose la question de la précarité des familles et des revenus… 

Les questions qui se posent à nous sont :

  • Comment généraliser ces expériences, en comprenant qu’elles sont singulières? Ces combats ne peuvent devenir un modèle de protection. Les institutions doivent réagir (police , justice , protection de l’enfance , bailleurs…)
  • Cette question n’est pas isolée des autres. Comment l’étendre et l’intégrer dans l’abandon global des quartiers populaires, du manque d’emploi, de services publics (cf. mobilisation pour la sauvegarde de la crèche de la Busserine)?
  • Comment construire nos propres réponses pour sortir du sentiment d’abandon et de culpabilité et passer à l’action collective ?
  • Il faut savoir réclamer son droit à être protégé par la puissance publique malgré la défiance. Comment exiger ce droit et réfléchir à comment transformer les institutions pour obtenir des réponses immédiates et à court terme?

Plusieurs pistes pour faire émerger des solutions ont été discutées:

  • Une légalisation sociale du cannabis (cf. texte joint par Mohamed du SQPM) qui permettrait de transformer les trafics en une économie légale
  • Il faut lutter contre les trafics d’armes qui circulent en toute impunité
  • Il faut réfléchir aux espaces publics comme biens communs qui doivent pouvoir être appropriés par toutes et tous
  • En Italie, des expériences d’appropriation sociale des biens confisqués aux mafias existent. Se pose la question de ne pas faire de cet outil un nouveau droit d’exception contre le retour du droit commun dans les quartiers populaires
  • La question des délinquance en col blanc a été peu abordée et devra l’être. On y retrouve les mêmes méthodes que dans d’autres formes de criminalités et celle-ci a un impact direct sur les quartiers populaires. Cf. l’exemple des magouilles dans le domaine de l’urbanisme qui conduisent à la dégradation du cadre de vie des quartiers populaires.

Nous avons convenu de poursuivre cet atelier à travers des débats publics, dans les quartiers populaires ou ailleurs. Un groupe de coordination s’est constitué pour cela et les présent·es à l’atelier seront recontacté·es.