VILLE ET GENRE

Logement et Genre

Traiter les problèmes spécifiques aux femmes

  • S’agissant de la violence conjugale, on peut revendiquer qu’un hébergement ou des logements soient mis à disposition de la mairie pour ces femmes (comme c’est le cas dans plusieurs villes d’Ile de France) ou pour les agresseurs expulsés du logement conjugal. A un autre niveau (celui des Juges aux Affaires Familiales et de l’État), faire en sorte que les politiques contre la violence soient réellement appliquées, en particulier celle de l’ordonnance de protection et d’expulsion du conjoint violent pour maintenir dans leur logement les femmes ayant subi des violences dans le couple.
  • Imposer la perspective féministe dans les politiques municipales pour développer des politiques d’égalité au niveau de la ville et promouvoir la mise en œuvre des dispositifs existants (par exemple : a été évoqué l’idée d’une une adjointe sur les questions d’égalité et de féminismes).
  • Construire des initiatives d’hébergement et de logement auto-gérées par et pour des femmes, très développées en Allemagne pour retirer du marché privé une partie du parc de logements et limiter ainsi la gentrification.

Ces initiatives peuvent difficilement se développer à très grande échelle mais elles peuvent permettre de proposer des alternatives aux CHRS qui tendent à limiter l’accès à certaines catéories de populations (notamment aux femmes seules avec enfants et/ou victimes de violence) ou aux logements existants qui n’intègrent pas l’importance de la division genrée du travail (dans ces types de logement autogérés, l’habitat peut être pensé pour collectiviser les tâches domestiques, avec notamment des cuisines collectives et des tours de ménage).

Intégrer une perspective en termes de genre dans les politiques de logement

  • Politiques de logements sont conçues par et pour des hommes, il importe donc d’intégrer l’idée selon laquelle les femmes sont en charge de la salubrité des lieux – charge d’autant plus importante dans des logements vétustes –, elles doivent pallier les difficultés quotidiennes que pose la vie en hébergement (ex : pas de cuisine etc.)
  • Au moment de la (re)construction de logement, intégrer l’importance de l’accessibilité des lieux, notamment pour faciliter le quotidien des femmes en charge des personnes vulnérables (enfants, personnes âgées ou non-valides)
  • Demander plus de transparence dans les critères d’attribution des logements sociaux et de la part de la CAF.
  • Faire en sorte que le fait d’avoir un enfant n’est pas une condition pour accéder à un hébergement d’urgence ou un logement
  • Contribuer à faire pression pour que le quota de 20 % de logements sociaux construits soit effectif et non détourné, notamment en revendiquant de changer l’échelle de la ville aux quartiers, pour éviter que ces logements sociaux soient uniquement construits dans les quartiers populaires.
  • Avoir une vue d’ensemble des actions et des mobilisations sur les questions de logement et d’habitat en construisant une cartographie des initiatives par quartiers // par types d’initiatives (actions ponctuelles, collectifs, associations plus spécialisées)

ESPACE PUBLIC ET TRANSPORTS

 L’espace public reste un reflet mais aussi un vecteur d’inégalités. Lorsque l’on parle d’espaces publics et de la place des femmes en leur sein, on ne considère que trop souvent la rue. Nous devons entendre le terme dans toute sa diversité – transports, publics ou non, et de leurs emprises – équipements publics.. La liberté et la tranquillité des femmes dans les espaces publics sont centrées sur le droit à la ville comme droit fondamental : droit de circuler librement, en toute sécurité, dans les espaces publics, droit d’utiliser les équipements publics, de bénéficier de l’offre de loisirs et bien sûr droit de participer aux décisions d’aménagement urbain.

Invisibilité et Vulnérabilité des femmes dans l’espace public :

  • Le premier élément qui rend les femmes « vulnérables », c’est la représentation qui associe l’espace public et le féminin en termes de danger, et que les femmes ont intériorisé comme étant la norme. Dès leur plus jeune âge, les filles se voient davantage contrôlées dans leurs mouvements et on leur dit davantage de faire attention, et ce, quand bien même on sait que les espaces les plus dangereux pour les femmes sont les espaces domestiques, les formes de violences les plus graves étant le fait d’hommes connus, d’hommes proches.

  • Ensuite, viennent les rappels à l’ordre sexué : toutes ces remarques, toutes ces intrusions, tout ce que l’on appelle désormais le harcèlement de rue, qui contribuent à réactualiser un climat de peur et qui, sans interdire purement et simplement l’accès des femmes aux espaces publics, produisent et renforcent un sentiment d’illégitimité et d’insécurité ressenti par les femmes lorsqu’elles circulent dans les espaces publics, et participe à l’utilisation différenciée des espaces publics : les femmes les traversent, les hommes les occupent.  Ces sentiments d’insécurité sont renforcés par de cruels manques d’éclairage la nuit. 

  • Quand les femmes occupent des espaces publics, souvent axés sur le « care »,  comme les parcs publics pour enfants, elles font face à du mobilier urbain inadapté, individualisé, comme les sièges individuels et éloignés les uns des autres. Ces dispositions, par essence anti-pauvre, font obstacle à la communication, le divertissement et l’entraides entre utilisateurs-utilisatrices du parc, en l’occurrence souvent les mamans. 

  •  81 voies portent un nom de femme sur plus de 5 000 rues Marseillaise,Donner des noms de femmes à des rues, c’est donner des repères, la possibilité à chacune et chacun de s’identifier, de pouvoir s’imaginer dans des catégories de gens qui sortent de l’ordinaire. La manière dont on nomme les rues, dont on visualise ou pas les femmes qui sont parvenues à sortir des cases qui leur étaient assignées.

  • La politique d’équipements sportifs publics favorisent les sports fortement genrés, par exemple le programme de requalification de Noailles, comprenant la mise en place d’un terrain de foot et de baskets, deux sports quasi-non mixtes. 

Transports : offre faible/peu adaptée/pas accessible/Pas de politique de transport alternatif

L’intersection des inégalités de genre avec des inégalités sociales et territoriales importantes, sont une des conséquences d’une politique des transports catastrophiques, ne prenant pas en compte les mobilités différenciées. • Plus utilisatrices des transports en commun • Trajets plus courts et plus fréquents • Déplacements tout au long de la journée • Plus grande variété des lieux fréquentés • Davantage d’accompagnements

Les mobilités différenciées des hommes et des femmes sont liées à des activités fortement marquées par des codes normatifs : les femmes ont des mobilités plus segmentées, plus locales, à des horaires décalées, arrêts fréquents, freins économiques. De plus, les femmes poussent, portent et accompagnent. De fait, les femmes utilisent moins les transports pour leur détente et leurs loisirs que les hommes. – Les femmes sont les premières personnes touchées par les difficultés rencontrées dans les territoires urbains fragilisés.

Assignation à résidence et freins à l’emploi 

Le manque de transports publics et offre inadaptée, peu d’offre de transports alternatifs type vélos publics, et absence de politique facilitant le covoiturage (à but non lucratif ?)

La politique des transports assignent à résidence les plus pauvres en périphérie.

  • 70% des pauvres sont des femmes, majoritairement racisées. La pauvreté est encore accrue chez les femmes cheffes de familles monoparentales dans les quartiers politiques de la ville, où elles représentent 1 famille sur 4 et vivent deux fois plus souvent sous le seuil de pauvreté qu’en dehors des zones urbaines sensibles.

  • La part de marché des transports en commun place l’aire urbaine d’Aix-Marseille dans une position plus proche de celle des villes nordaméricaines que celle des villes européennes. La part des transports publics dans les déplacements au sein de l’aire urbaine d’Aix Marseille n’était que de 8 % en 2010, et de 19 % au sein des communes de résidence (OCDE : https://www.oecd.org/fr/regional/politique-regionale/Aix-Marseille.pdf )

  • De plus, il y’a un problème d’accessibilité criant à Marseille, qui a conduit le Syndicat des poussettes enragées à qualifier Marseille de « cités interdites pour les minots » 

Propositions/Solutions

Ateliers, actions de terrain

  • Cartographie des initiatives existantes.
  • Généralisation des marches exploratoires dans tous les quartiers, et pas seulement les quartiers politiques de la ville. Cf : Ancrage
  • Généralisation des cours d’autodéfense et mutualisation des pratiques.

Etudes, diagnostics

  •  Pour évaluer l’existant, mais aussi en amont de tout nouveau projet urbain ou de transports, promouvoir le testing, et de réelles démarches de concertation locale pour favoriser l’expression de la parole et de l’expertise des femmes ;
  • Valorisation de la recherche autour des bonnes pratiques de politiques publiques sur les thématiques des transports et des espaces publics : cf : l’asso Genre et Villes

Communication :

  •   Visibiliser les femmes/minorités de genre illustres dans l’espace public, à travers la toponymie et les événements culturels ;
  • Prévention du harcèlement par des affichages publics destinés aux hommes. Ces affichages se doivent ni racistes ni classistes.
  • Les installations féministes dans la ville, telles que les photographies et les collages permettent aux femmes de se l’approprier.

Equipements publics :

  • Prendre en compte les mobilités différenciées, promouvoir dans tous les projets d’infrastructures transports financés, l’inclusion de critères d’analyse sexuée dans les cahiers des charges.
  • Développement des mobilités douces en faveur des femmes
  • Développement des navettes intra-quartiers pour simplifier les déplacements courts, principalement utilisés par les femmes.
  • Développement d’une communication spécifique relative aux usagères enceintes et aux personnes utilisant des poussettes ;
  • Généralisation de la descente à la demande sur les lignes de bus
  • Elargissement des trottoirs.
  • Eclairage obligatoire, rendu écolo-compatible par l’interdiction des éclairages publicitaires.
  • Accessibilité inconditionnelle de l’espace public, fin de la marchandisation de l’espace public.
  • Développement de l’espace public dédiés à des activités culturelles et sportives, des espaces publics neutres.
  • Mobilier urbain convivial et favorisant les rencontres.

Participation à la vie citoyenne et militante

On ne construira pas un monde débarrassé du patriarcat si on ne se débarrasse pas du patriarcat et du sexisme au sein de nos organisations et nos institutions.

Prise de parole des femmes :

Constat : Les hommes ont davantage la parole, coupent plus facilement la parole aux femmes, et reformulent leurs idées. La parole des femmes est dévalorisée. Si elles haussent le ton, elles sont tout de suite qualifiées d’« hystériques ». Il faut toujours qu’elles défendent leur petit bout de terrain, leur place.

Les hommes se sentent légitimes de prendre la parole. À force d’expériences, ils ont atteint une certaine expertise, une habitude. Alors qu’en tant que femmes, on se questionne sur notre légitimité.

On intégre la culpabilité de parler. Résultat, on prend la parole en fin de réunion. Le processus de socialisation donne lieu à une autocensure, un manque de confiance. Ce sont des mécanismes qu’on ne met pas toujours en question. Il faut éduquer les hommes et les femmes des le plus jeune âge.

Une participante note la difficulté d’autant plus grande quand on est « la seule femme noire » d’une assemblée pour prendre la parole.

Podcast « les couilles sur la table » sur le langage : les femmes disent « peut être, il faut que je vérifie », alors que les hommes affirment leurs idées.

La discrimination genre est une chose, mais aussi discrimination niveau d’étude, niveau de richesse, personnes racisées. Manque de représentativité. On n’écoute pas quelqu’un un qui galère à prendre la parole ou a un vocabulaire marqué socialement de la même manière. Comment mobiliser les personnes qui mènent des luttes au quotidien. Comme favoriser cette participation, cette parole ?

Propositions :

Favoriser l’entraide, la solidarité : on note plus d’écoute quand on est entre femmes : organiser des réunions non-mixte ? Dans les réunions, la sororité et la bienveillance doivent être mise en place entre nous, dire à une femme « tu as quelque chose d’intéressant à dire, dis-le » : laisser la place.

S’exercer à prendre la parole : organiser des temps pour apprendre à prendre la parole, des techniques pour travailler la confiance en soi. Mettre en place des ateliers d’entraînement mental pour apprendre à gérer le stress de la prise de parole. Création d’outils (vidéo ? Proposition de Margaïd) à partager aux seins des collectifs et dont les femmes peuvent s’emparer.

Créer une méthode/charte de « réunion respectueuse » avec des outils, des méthodes par exemple : tirer au sort une personne qui s’occupe de la médiation dans la réunion. Alternance obligatoire hommes/femmes dans la prise de parole. Faire remonter les personnes qui n’ont pas encore parlé. Imposer un temps de silence de quelques secondes après chaque prise de parole. Permet d’être sûr.e que la personne a fini de parler et laisse le temps à celles qui le souhaitent de lever le doigt pour prendre un tour de parole. Ne pas hésiter à reprendre la parole, le micro aux hommes.

  • Nommer le problème « tu me coupes la parole », proposer d’autres moyens si les personnes ne se sentent pas à l’aise pour parler (une feuille pour écrire, une possibilité de parler en one to one à la fin de la réunion, par exemple).
  • l’éciture inclusive autant que possible, car elle permet de visibiliser les femmes et les personnes LGBTQI+ au sein des collectifs militants. Trouver un usage : éviter de dire homme et dire être humain, ou les personnes. Quand on met au pluriel s’il y a une majorité de femmes, genrer au féminin

Attention à ce que l’écriture inclusive ne devienne pas un poids, une injonction supplémentaire pour ceux et celles qui ont du mal à prendre la parole.

La prise de responsabilité :

Constat : La prise de responsabilité est le vrai problème. Comment permet-on aux femmes d’accéder aux postes de pouvoir ? Souvent, on met les femmes en échec, on ne leur donne pas les outils (garde d’enfant, échange d’informations…) qui leur permettent de réussir.

Dans le milieu politique, on renvoie les femmes à leur statut « qu’est ce que tu fais en réunion à 20h ? » si tu viens en réunion et que tu as des enfants. On leur renvoie qu’elles auraient couché pour réussir, qu’elles seraient là grâce à la parité, en mettant en doute leur compétences

La parité à permis de changer les mentalités mais les femmes sont victimes de procès en compétence. Elles ne seraient là que par « discrimination positive ».

Comment arriver à concilier militantisme, engagement politique et quand même garder le contact avec ses enfants, que l’on soit homme ou femme ? Problème de l’autocensure, absence des femmes du militantisme quand elles ont des enfants en bas âge. Il y a un déficit de femmes entre 30 et 40 ans dans les partis politiques. Des réunions importantes organisées tôt le matin ou tard le soir quand les mamans sont occupées et si elles viennent, elles sont culpabilisées.

Pourtant, rien n’est organisé pour favorisé leur présence, malgré les bonnes intention. Par exemple, avec la mise en place des conseils citoyens, la loi prévoit que des garderies peuvent être organisées en marge des réunions. Ce n’est jamais fait. Dans les quartiers populaires, les seules qui s’impliquent sont des femmes âgées. Les personnes racisées ne sont pas présentes et la parole des quartiers pop (surtout femmes pauvres) est confisquée par les blanches. C’est encore plus difficile pour les personnes sans papier qui ont, en plus, la crainte administrative.

Solutions :

  • travailler entre femmes
  • réfléchir collectivement aux horaires de réunion qui conviennent à toutes et tous
  • inciter les parents (femmes ou hommes) à venir avec leurs enfants aux réunions pour visibiliser le problème
  • organisation systématique de garderies dans les réunions, les états généraux, en marge des conseils municipaux… ? intégrer cette contrainte dès le début de l’organisation comme une priorité
  • sensibiliser les hommes à la répartition des tâches : créer une newsletter interne aux institutions de veille et de sensibilisation à l’égalité femmes-hommes
  • pour favoriser la participation des femmes racisées et précaires, créer des binômes « bienveillants » sur le modèle de l’association des parents d’élèves de Chabanon (par ex, un co-secrétariat blanche /racisée sans-papier)
  • dans chaque collectif, avoir des animateur.ices qui partagent l’info, distribuer la parole, aident ceux qui n’osent pas… des personnes dégagées des enjeux de pouvoir qui prennent ça en charge (attention à ce que ce ne soient pas des femmes qui s’en chargent)
  • instaurer des tirages au sort pour attribuer les postes dans les institutions/les collectifs